vendredi 22 février 2008

Interview : Dany Zie, cofondateur du portail kamerhiphop.com


Bonjour Dany, vous êtes l’un des promoteurs du site KamerHipHop.com, dédié au Hip Hop Camerounais. Pouvez-vous nous présenter l’organisation du site et nous dire ce qui vous a motivé à lancer un tel projet ?

Kamerhiphop.com est né d’un « délire » de deux jeunes étudiants en Informatique, Idrissou, le second promoteur du site et moi même. A l’époque, en 2003, nous étions étudiants dans une structure privée de la place. Nourris par notre passion partagée pour le hip hop et l’ingénierie web, nous avons donc entamé la conception de ce projet. Avec l’aide de Badjez (du groupe C-minaire), nous avons prospecté et rencontré certaines personnalités du milieu artistique kamer à l’instar de Krotal, DJ Bilik ou encore Ruben Binam et Manuel Wandji, pour présenter le concept. Ce qui nous a permis de l’affiner. Le développement du site quant à lui nous a pris environ 6 mois puisqu’il a fallu implémenter une solution de gestion de contenu propriétaire. [La première version a été mise en ligne en juin 2006. Nous avons relooké le site en Janvier 2007.

Le portail kamerhiphop.com vient donc répondre à ce cruel constat : l’absence de visibilité pour notre culture Hip hop. Le talent et une production suivie associés à une promotion soudée reste la base du succès. Aussi, offrir de nouvelles options aux promoteurs culturels à travers notre portail est notre souci et reste notre défi. Notre Hip Hop a beaucoup évolué depuis le temps et mérite un peu plus d’attention et de considération. Il reste injustement marginalisé chez nous.

Le concept est explicite : créer un espace virtuel où le visiteur sait qu'il trouvera tout ce qui l'intéresse sur un sujet ou, tout au moins, qu'il pourra s'en servir comme porte d'entrée vers d'autres sources d'information pertinentes. A ce titre, le portail réalisé avec comme thématique de base la culture hip hop au Cameroun propose donc de l'actualité, des chroniques, des interviews, des biographies d’artistes et personnalités en relation avec le hip hop, des dossiers d'information, un agenda évènementiel, une plateforme multimédia (audio/vidéo/photos), des lyrics, un forum de discussion et un annuaire de liens.

En résumé, un site portail est un site ouvert vers l'extérieur qui joue le rôle de relais d'information, et kamerhiphop.com est un portail sur le hip hop Camerounais menée par un petite équipe de passionnés.

Selon vous, s’il fallait énoncer un ensemble de problèmes qui minent le Hip Hop Camerounais, quels seraient-il ?

Le Hip hop comme je le disais plus haut reste une culture marginale au Cameroun encore plus qu’ailleurs. Magali Palmira de Real Black Music au Gabon me le rappelait encore tout récemment, et je crois que c’est la base du problème.

Mais à coté de cela, il y’a un sérieux problème de visibilité nationale et surtout internationale. Il y a de bons artistes au pays mais qui ne sont connus que dans leur quartier. Vous savez, les camerounais sont un peu bizarres. Ils considèrent réellement que ce qui est pris en considération ailleurs. Un piètre artiste camerounais, pour peu qu’il vienne d’une contrée éloignée, sera très souvent accueilli en héros par le public camerounais. Personnellement, je pense que c’est l’international pour les artistes Camerounais qu’il faut séduire et convaincre. Et pour ce faire, il faut un peu plus de professionnalisme dans la démarche artistique. C’est un autre sérieux problème dans le hip hop Camerounais. Les choses ne sont pas assez structurées : comment mettre en place un album techniquement correct quand l’artiste joue l’apprenti sorcier dans une chambre sur son Pentium II ? Comment mettre en place une promotion sérieuse avec son cousin aux commandes qui n’y connaît rien à la communication professionnelle ? On verra des gens qui cumulent les pseudo fonctions de Manager artistique, Interprète, Auteur/compositeur, Monteur Vidéo, Graphiste, Chorégraphe… (rires). En essayant d’y voir plus clair, on constate que c’est l’appât du gain qui rend les frères aussi pitoyables.

Les artistes gagneraient à s’entourer de professionnels et se concentrer sur l’artistique. Leurs prestations n’en seraient que meilleures.Pour résumer, le Hip hop camerounais est en marge culturelle. Pourquoi ? Parce qu’il y’a un manque de professionnalisme à la base, c'est de là que part le malaise.

Au regard de tout cela, quel rôle pensez-vous pouvoir jouer et quelle pierre comptez-vous apporter à l’édifice Hip Hop à travers ce site ?

Nous proposons un autre canal de communication (et pas des moindres) aux artistes et promoteurs culturels dans la perspective de rendre notre hip hop crédible aux yeux du monde entier et par ricochet aux yeux des camerounais et offrir ainsi des opportunités réelles aux acteurs du mouvement. Et je pense que la machine est en marche. Aujourd’hui, les artistes hip hop sont référencés sur la toile grâce à kamerhiphop.com en grande partie. Le rappeur Oliviera vient de terminer l’enregistrement de sa prochaine EP (Extended Play), grâce au jeu-concours organisé par Les Coudes Productions, une structure basée en Allemagne en partenariat avec kamerhiphop.com. Pleins d’artistes sont invités dans des festivals internationaux grâce aux services dérivés de kamerhiphop.com.

Actuellement, plusieurs partenariats sont en cours définition avec des structures de distribution numérique internationale, avec des maisons de production et de management (Plus Prod, Eben, Real Black Music…) des télévisions internationales pour œuvrer à faire connaître notre hip hop qui ma foi mérite une certaine attention.

Le travail de promotion de KAMERHIPHOP n’est-il pas un peu contradictoire dans la mesure où vous dites que vous voulez séduire à l'international, tout en sachant que ce n’est pas ce public qui achètera les disques d’artistes qui ne se vendent que sur le marché local ?

Je ne pense pas. La cible de kamerhiphop.com reste à la base la diaspora. Pourquoi ? Et bien parce que le marché réel à conquérir est ailleurs. L'environnement commercial local n’est déjà pas prolifique pour les artistes de Makossa, comment le serait-il pour les artistes hip hop ? La conquête de l’international sera LA victoire et LA révolution du hip hop kamer. Je ne suis pas sûr que des groupes comme Daara-J ou Yelen réalisent leurs chiffres d’affaires respectivement au Sénégal et au Burkina-Faso. Les causes de l’échec commercial en Afrique sont connues, je n'entrerai pas dans les détails.

Et Internet dans tout ça ? Et bien d’après une récente étude du Minpostel, le taux de pénétration de l’Internet au Cameroun serait de 0,17%. C’est assez lamentable mais ça reste clairement un domaine à conquérir. On ne peut pas ignorer ces difficultés mais on en peut non plus s’y contraindre. Internet est L’OUTIL des nouvelles générations et je suis sur que les objectifs du site kamerhiphop.com seront rapidement atteints grâce à l’implication de nos collaborations internationales. Les maisons de disques et les promoteurs chevronnés ne sont pas au Cameroun. Les camerounais apprendront à suivre, comme toujours malheureusement et c'est pas l'équipe de bonaberi.com qui me dira le contraire (rires).
Les vidéos, les audios et les interviews constituent un bon moyen de faire connaître nos artistes. Envisagez-vous d'augmenter considérablement le stock de vidéos disponibles et de mettre en place d'autres styles de vidéos, comme des interviews d'artistes ou des concerts ?

Bien sûr. Le but est de vendre une image de marque du hip hop kamer. Pour ce faire, les vidéos et les sons sont sélectionnés sur des critères "professionnels". C’est pour cela que notre banque de données multimédia n’est pas encore assez fournie. J’invite par la même occasion les artistes hip hop camerounais de par le monde à nous faire parvenir leurs médias promotionnels pour le site. C’est free.
En ce qui concerne les vidéos, une nouvelle rubrique « La Vidéothèque » a été crée pour contenir des vidéos autres que des clips comme justement des extraits de spectacles et d’émissions télévisées.


Pour revenir au Hip Hop en tant que tel, pourquoi a-t-on l’impression que les Camerounais restent en marge du Hip Hop Africain ? On a connu par le passé de grands groupes de rap africains, tels les Sénégalais Positive Black Soul ou Daara J, qui avaient acquis une dimension internationale. Au Gabon aujourd’hui, quelques groupes émergent. Qu’en est-il des Camerounais ?

Ce n’est pas juste une impression. Mais cela est en train de changer. Des artistes résident au Cameroun sont en train d’acquérir une dimension internationale. Krotal par exemple était récemment au Congo et en Belgique au festival Sfinks. Lady B, X-maleya et Zomloa déjà très populaire au Gabon, Parol est resté numéro 1 durant plus d’un mois dans le Hit 2 Rue de la chaîne de télévision urbaine Trace Tv… Je crois que la machine est en marche.

Comment entrevoyez-vous l’évolution du Hip Hop au Cameroun dans les prochaines années et quels seront, selon vous, les artistes qui émergeront ?

Vous savez, sur les starting blocks, ils sont nombreux mais au finish je pense que sortiront du lot ceux qui auront su construire les fondations d’une carrière artistique professionnelle. Il y a malheureusement plein d’apprentis sorciers qui ne sont là que pour la frime et qui n’ont aucune démarche artistique structurée et structurante. C’est le mouvement qui en paie les pots cassés parce que c’est justement ces derniers qui dévalorisent et décrédibilisent cette culture hip hop.

Le mot d’ordre reste pour moi « professionnalisme » et celui-ci passe par un entourage sérieux et spécialisé, un travail ardent dans la recherche de l’originalité et beaucoup de voyages pour s’imprégner des réalités du monde artistique. Tout en sachant que professionnalisme implique forcément moyens financiers d'une manière ou d'une autre...

Pour nous qui découvrons le Hip Hop Camer, quels artistes et quels albums méritent actuellement le détour selon vous ?

La liste est longue. Mais je pense que sortent du lot par leur talent et leur sérieux des artistes comme Krotal, Sidney, Lady B, Ak Sang Grave, Wilfried, Danielle Eog, Oliviera, la famille zomloa, Obidy, Holokost, mbalè mbalè, C-minaire, L’écurie So sound, Tawu, Parol… Comme je le disais la liste est loin d’être exhaustive…

Prévoyez-vous de donner à KAMERHIPHOP une dimension encore plus rédactionnelle avec des chroniques des albums des artistes, histoire qu’ils soient jugés à la hauteur de leurs performances ?

Sur le site, il y a des chroniques d’artistes kamer. C’est vrai c’est généralement des artistes de la diaspora mais il y en a également sur des artistes locaux comme sultan Oshimihn ou Lady B par exemple. Les chroniques nous sont généralement proposées car nous n'avons pas encore de chroniqueur attitré. Je lance donc par la même occasion un appel aux hommes des médias qui s’intéressent au hip hop kamer de près pour des propositions de chroniques et des dossiers sur les artistes camerounais et leurs productions.

Un dernier mot pour les internautes susceptibles de visiter KAMERHIPHOP.COM

Aux visiteurs, je leur souhaite de prendre du plaisir sur notre site et surtout de ne pas hésiter à donner leur avis à travers des commentaires ou par email. C’est grâce à ceux-ci que nous pourront améliorer nos services.

Les artistes, n’hésitez surtout pas à nous contacter directement et nous envoyer vos supports multimédia promotionnels. C’est free (zie_dany@yahoo.fr).Quant aux promoteurs, je dirais que kamerhiphop.com est un canal de communication crédible, si votre cible principale est la jeunesse, et les acteurs culturels dans une moindre mesure. Kamerhiphop.com c’est déjà plus de 375 000 visites cumulées et en moyenne 600 visites quotidiennes.

bonaberi.com

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